Pas d’action non-violente sans journaliste ! Gandhi, dès sa toute première action publique en non-violence — alors qu’il était totalement inconnu de tout le monde —, pris soin d’inviter un journaliste de la presse locale. Ainsi procédèrent ensuite Martin Luther King, les paysans du Larzac et tant d’autres acteurs non-violents jusqu’à notre époque. Et que seraient devenus Greenpeace, les faucheurs volontaires, les enseignants désobéisseurs… sans ensuite un contact régulier avec la presse ?
Pas d’action non-violente sans journaliste ! Parce que la presse est le levier qui peut faire connaître une action de rue et parler de l’injustice qu’elle dénonce, ce qui a pour conséquence de forger les opinions publiques alors capables de peser sur les auteurs de l’injustice. Si les médias ne parlent pas plus de non-violence de nos jours, reconnaissons humblement que cette situation provient du seul fait qu’il existe de nos jours encore bien peu d’actions se référant explicitement à la non-violence.
Pas d’action non-violente sans journaliste ! Hier comme aujourd’hui, c’est la presse qui forge les opinions publiques, même s’il est vrai que nous savons qu’elle est le plus souvent dans les mains de groupes financiers sans vergogne. C’est cependant dans Le Figaro que j’ai lu le plus bel article, sur une page, au sujet du combat mené par des antipublicitaires contre l’invasion de la publicité dans l’espace public. Il est certain, par ailleurs, qu’Internet est un outil merveilleux et change quelque peu la donne. Trop de journalistes ne travaillent qu’à partir de données trouvées sur la Toile, au point d’oublier trop souvent de faire eux-mêmes des investigations de terrain.
L’intérêt de ce numéro d’ANV réside dans son approfondissement du phénomène journalistique, de ses contraintes et modes, tout en faisant comprendre le rapport entre presse et non-violence. Celle-ci casse la tyrannie de l’immédiateté. Un combat non-violent se joue sur la durée. Aux acteurs non-violents de savoir provoquer l’événement dans l’espace public et d’entretenir la problématique de l’injustice dénoncée au gré des mois et des années.