Jean-Marie Muller réagit à l'actualité.

Dans son article "Quelle campagne mener en France pour l'élimination des armes nucléaires?", il plaide pour le désarmement nucléaire de la France.

Quelle campagne mener en France pour l'élimination des armes nucléaires?

Ainsi donc, le prix Nobel de la Paix 2017 vient d’être attribué à la Campagne internationale pour l’abolition des armes nucléaires (ICAN) pour le rôle qu’elle a joué dans l’adoption par l’ONU du Traité d’interdiction des armes nucléaires. Il est  remarquable que le mot qui revient le plus souvent dans les commentaires qui s’efforcent d’apprécier le dit traité est celui de « symbolique ».

L’adjectif symbolique, nous dit le dictionnaire, « s’applique à ce qui n’a pas d’efficacité ou de valeur en soi ». Il est sûr qu’il serait illusoire de penser que les Etats dotés se laisseront convaincre par les arguments avancés qui visent à délégitimer l’arme nucléaire. Le traité d’interdiction n’aura d’autre efficacité que celle que lui donneront les Etats dotés qui décideront d’adhérer à celui-ci. Or, précisément, tous les Etats dotés ont déclaré haut et fort qu’ils refusaient de reconnaître le bien-fondé de ce texte. Dès lors, le traité n’aura que l’efficacité que lui conféreront les citoyens de chaque Etat doté en se mobilisant au sein de la société civile pour exiger le désarmement nucléaire de leur pays.

La question se pose de savoir quelle campagne doit être organisée en France en faveur du désarmement nucléaire. Certains militants antinucléaires pensent qu’il faut organiser une campagne pour demander aux citoyens français de réclamer l’abolition des armes nucléaires. Mais quand bien même une majorité de citoyens français se déclareraient en faveur de cette abolition - ce qui est fort probable -, cela n’aurait aucun effet sur la politique nucléaire de l’Etat français. Ce serait en quelque sorte une campagne pour rien. D’autant plus que, faut-il le rappeler, les Etats membres du Traité de Non Prolifération (TNP) dont la France fait partie ont l’obligation de négocier de bonne foi le désarmement nucléaire à une date rapprochée, mais qu’ils sont bien décidés à n’en rien faire.

Ce qui caractérise le Traité d’Interdiction c’est précisément qu’il veut sortir de la logique du désarmement multilatéral pour promouvoir une logique multi-unilatérale. Dès lors, la seule campagne qui puisse avoir un impact sur la politique nucléaire de l’Etat français est d’exiger qu’il devienne un Etat Partie du Traité et qu’il « s’engage à jamais, en aucune circonstance, à mettre au point, mettre à l’essai, produire, fabriquer, acquérir de quelque autre manière, posséder ou stocker des armes  nucléaires, employer ni menacer d’employer des armes nucléaires. »

L’impératif stratégique rejoint l’impératif éthique pour affirmer que le désarmement mondial bien ordonné commence par soi-même…

Parmi les initiatives récentes, notons cette proposition de lettre faite aux parlementaires :

 

ENGAGEMENT PARLEMENTAIRE : « Nous, les parlementaires soussignés,

accueillons chaleureusement l’adoption le 7 juillet 2017 du traité des Nations unies sur l’interdiction des armes nucléaires comme une étape importante vers la réalisation d’un monde exempt d’armes nucléaires. Nous partageons la profonde préoccupation exprimée dans le préambule devant les conséquences humanitaires catastrophiques qui résulteraient de toute utilisation d’armes nucléaires, et nous reconnaissons le besoin qui en découle d’éliminer ces armes inhumaines et abominables. En tant que parlementaires, nous nous engageons à travailler à la signature et à la ratification de ce traité historique par nos États respectifs, car nous considérons que l’abolition des armes nucléaires est un bien public mondial de premier ordre et une étape essentielle pour promouvoir la sécurité et le bien-être de tous les peuples. »

http://www.icanw.org/projects/pledge/

 

Jean-Marie Muller

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